Bernard Buffet au château de Vascœuil, l’exposition qui retrace 50 ans d’œuvres

Art

« La peinture, on n’en parle pas, on ne l’analyse pas, on la sent. » disait Bernard Buffet, l’artiste qui a réuni un bon nombre de visiteurs au château de Vascœuil à l’occasion de l’exposition Bernard Buffet. A l’occasion de ses 50 ans, le Château de Vascœuil organise une exposition consacrée aux œuvres de Bernard Buffet d’avril à octobre 2019. Cette exposition est soutenue par les Fonds de Dotation Bernard Buffet créés en 2009. En guise d’hommage à l’artiste, l’exposition met en avant une cinquantaine de créations du peintre expressionniste de renommée internationale. L’exposition Bernard Buffet rencontre un véritable succès auprès des visiteurs qui ont pu contempler ses huiles sur toile mais aussi ses lithographies, ses gravures et les œuvres de sa vie. La rétrospective qui lui est consacrée à Vascœuil se concentre majoritairement sur ses dernières œuvres, centrées sur la mort et la mélancolie.

La peinture du ressenti

Décrit comme l’un des plus grands peintres modernes français du XXe siècle, Bernard Buffet était un véritable artiste aux multiples facettes : peintre, dessinateur, concepteur de décors de théâtre, d’opéras et de ballets. Buffet s’intéresse très jeune à la peinture et se fait rapidement connaître en 1946 lorsqu’il expose son autoportrait au Salon des Moines de Trente Ans à la Galerie des Beaux-Arts. Il reçoit dès lors le prestigieux Prix de la Critique à tout juste 20 ans qui lui permet de lancer sa carrière. Bernard Buffet est obnubilé par la peinture : il peint dans l’appartement de ses parents au quartier des Batignolles dans le 17e arrondissement de Paris et dans la maison de ses grands-parents dans les Hauts-de-France. Il se peint lui-même, utilise ses proches comme modèles et peint des objets de la vie quotidienne.  

Œuvres et thèmes

Parmi ses plus grandes œuvres, nous retiendrons les œuvres suivantes : Lapin et casserole rouge (1948) un objet de la vie quotidienne assez récurrent dans les tableaux de Buffet. Le Travesti (1953) représentant une certaine forme de solitude mais aussi de mélancolie. Tête de clown (1955), le thème du clown étant récurrent chez Bernard Buffet, cette peinture représente un clown jaune et rouge, ridé sur le front avec un regard vide. Le cirque : deux clowns (1955) représentant encore des clowns mélancoliques peints dans des couleurs ternes. Le coq mort (1947) symbolisant la mort, un des thèmes de prédilection de l’artiste. Femme au poulet (1947) peint selon les traditions de l’expressionnisme et du misérabilisme, met en œuvre une femme tenant fermement le cou d’un poulet dans sa main gauche.

Quant au tableau, Deux hommes dans une chambre (1947) Buffet cherche sans doute à dénoncer l’homosexualité, un sujet encore tabou à l’époque. Ce tableau, présenté au Prix de la Critique en 1948 à la Galerie Saint-Placide lui permet de décrocher ce prix. Les principaux thèmes abordés par Buffet : la mort, la sexualité et l’Histoire ne sont pas en adéquation avec son époque durant laquelle les artistes s’inspirent de l’engagement politique ou encore de la figuration et l’abstraction.

La biographie de Bernard Buffet est livrée à travers ses œuvres marquées par la pauvreté et l’angoisse au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Tiraillé entre deux identités distinctes : peintre de génie et peintre prolixe, Buffet s’intéresse particulièrement aux clowns et réalise de nombreux portraits de clowns tristes qui témoignent de l’angoisse existentialiste qui habite le peintre jusqu’à son suicide en 1999. La peinture de Buffet intrigue. Elle répond aux critères de l’expressionnisme, un courant par lequel les artistes expriment le pessimisme de leur époque en manifestant leur angoisse par une utilisation non réaliste de la couleur, la déformation des êtres humains ou des symboles en faisant disparaître les détails. Ses œuvres nous rappellent celles d’Otto Dix, notamment Le cri d’Edvard Munch représentant les horreurs de la Première Guerre Mondiale.

L’expressionnisme prend racine en Allemagne en 1905 autour du groupe Die Brücke, composé d’Ernst Ludwig Kirchner, Erich Heckel, Karl Schmidt-Rottluff et Max Pechstein dans un contexte d’avant-guerre présageant certaines inquiétudes et un vague à l’âme. La peinture devient alors un véritable cri de désespoir pour les artistes qui se penchent sur la réalité du monde extérieur. Cette forme d’art moderne a été condamnée par l’Allemagne nazie décrite comme « dégénérée » par Goebbels, ministre de la propagande du Reich. Bernard Buffet a fait partie des artistes anticonformistes et rebelles de sa génération, qui a su vivre de sa passion jusqu’à la fin de sa vie.

La préfiguration de la mort

Si Pierre Bergé a partagé sa vie durant huit ans tout en l’accompagnant dans sa carrière, l’écrivaine Annabel Scwhob a tenu un rôle emblématique dans la vie de l’artiste. Le couple se marie en 1958 et rapidement, le peintre fait de son épouse, sa muse. Il lui rend hommage à travers une exposition de 1961 nommée Trente fois Annabelle Schwob.

Buffet est également influencé par de célèbres artistes tels que Françoise Sagan, Brigitte Bardot, Georges Brassens ou encore des écrivains de renom : Camus, Sartre et Boris Vian. Buffet partage les principes de la philosophie de l’absurde et se dit proche de l’existentialisme sartrien. On remarque dans l’œuvre Phare et Sémaphore (1958), une certaine représentation de l’atmosphère pesant décrit dans La Nausée de Sartre (1938) où l’auteur livre le portrait d’un personnage n’arrivant pas à sentir son être. Les couleurs illustrées sont verdâtres et grises. Ce tableau dissimule également une préfiguration de la mort de l’artiste survenue l’année suivante. La carrière de Buffet continue même après sa disparition.

Ses lithographies possèdent toujours une valeur inestimable dans le monde de l’art. Les lithographies du peintre font partie des meilleures ventes de tableaux de Buffet à Paris. Les visiteurs de l’exposition Bernard Buffet ont pu découvrir les plus grandes lithographies de Buffet parmi ses 50 ans d’œuvres. Ses estampes originales, de simples reproductions photomécaniques faites sur papier, ont également conservé une grande valeur sur le marché. Les œuvres de l’artiste sont aujourd’hui vendues entre 500 à 20 000 euros.  

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